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La loi du chaos grandissant STM 81

 Les ordinateurs sont l'image même de la rigueur, n'est-ce pas ? De fidèles serviteurs suivant à la lettre les instructions qui leur sont fournies. L'image qu'un informaticien aimerait pouvoir donner de son métier est celle d'un horloger mouvant d'invisible rouages logiciels dans un ordre et une précision absolue... Alors que dans la réalité, l'informaticien se sent plutôt dans la peau du directeur de l'annexe psychiatrique d'un zoo! Pourquoi l'ordre numérique dégénère-t-il si souvent en chaos ? C'est ce que nous apprend la Seconde loi de Small...

Machines, mes compagnes

   Afin de vous expliquer pourquoi j'ai formulé ma Seconde loi, je dois vous ennuyer un moment et vous raconter un peu ma vie. Sachez que la Seconde loi n'est pas née de grandes théories fumeuses, mais bien de mes observations directes et de mon expérience avec les ordinateurs.

   Je fréquente les ordinateurs depuis... voyons... 1972, depuis ma Quatrième. Cela fait donc 22 ans que j'ai rencontré pour la première fois un terminal Teletype doté d'une "mémoire de masse" constituée d'un lecteur et d'un perforateur de bandes de papier. J'ai à présent 35 ans, ce qui fait que j'ai passé 60% de ma vie en compagnie des ordinateurs.

   Depuis 1980, la fréquentation est passée du passe-temps au gagne-pain (gagne-miettes étant hélas parfois un terme plus approprié). Pendant ces vingt-et-un ans, j'ai écrit moult programmes. forçant souvent les machines à faire des choses pour lesquelles elles n'étaient pas conçues, ou encore contournant des restrictions qui me déplaisaient. J'ai dû apprendre de nombreux langages. La plupart du temps, je programme en assembleur et en BASIC, mais l'ai touché à différents autres langages : APL, C, Fortran (toujours un bon choix pour faire mouliner un Cray), voire Pascal (beuh !). Sans compter qu'il m'a fallu m'imprégner des spécificités des matériels sur lesquels je travallais.

Des monceaux de données

   Tous ces programmes représentent des monceaux de données brutes. Centains d'entre eux sont très longs. Spectre GCR compte quelque 25 000 lignes de code, mais j'en ai écrit en réalité beaucoup plus. puisqu'il faut tenir compte des très nombreuses lignes supprimées ou remplacées, des "échafaudages" de test (c'est-à-dire les routines que l'on écrit pour pouvoir tester un programme en cours d'écriture). En outre, certaines parties du code ont été éliminées pour cause d'obsolescence : lorsque j'ai supprimé le support des ROM 64 k, qui n'intéressent plus personne, ce sont au moins 10 000 lignes qui ont sautées. Au total, Spectre représente au bas mot 50 000 lignes. Et ce n'est qu'un seul des produits que j'ai réalisés au cours de toutes ces années!

   Pour mieux voir ce que représente ce chiffre, disons que ces lignes sont du code source (lisible par un humain), ce qui n'est guère différent d'un texte (mettons une lettre quelconque) saisi à l'aide d'un éditeur. À raison de 55 lignes par page, cela fait 909 pages. Ce qui ne semble pas énorme, sauf lorsque je l'imprime. Pour produire un programme exécutable, je fais passer ce code source dans un programme appelé assembleur, qui engendre des instructions en langage-machine 68000 (pour ST) ou 68030 (pour TT ou Falcon). Centes, je ne prétends pas que mes programmes battent les records de taille, mais enfin, ça fait tout de même un nombre impressionnant de frappes au clavier (avec deux doigts !)

   Toutes ces lignes de code source se sont donc accumulées au fil des années. Et le code source est un fichier de texte, c'est-à-dire des données. Il n'y a pas de différence fondamentale entre ces fichiers et des fichiers provenant d'une base de données ou d'un compilateur. Toutes ces données sont en fait des alignements d'octets mis bout à bout dans des fichiers. (Il y a même une autre loi de l'informatique qui dit que les données s'accumulent toujours jusqu'à emplir la totalité de l'espace disque disponible...) Et on aboutit toujours à un tas de bits, des zéros et des uns arrangés dans un certain ordre. Le binaire n'est d'ailleurs pas la meilleure façon de manipuler des données numérique, et on aura un jour des ordinateurs qui emploient plus de deux états pour représenter l'information.

   J'estime avoir écrit au moins 50 mégaoctets (Mo) de code source durant ces 21 ans. Le source de Spectre GCR fait à lui seul 4 Mo, et j'ai réalisé plusieurs projets de cette ampleur: la ROM du lecteur de disque dur d'un système nommé L. E., écrit en langage machine 780: le code du système UDC, constitué de huit 780 en parallèle (extrêmement difficiles à synchroniser !), et quelques tonnes de code en assembleur Cyber pour. . . euh. . . pouvoir accéder à des choses qui m'intéressaient, du temps où j'étais étudiant. (Je suis prudent car j'ignore quels sont les délais de prescription pour les délits informatiques.)

Monceaux, certes, mais organisés

   Donc, Si vous utilisez une application quelconque, que ce soit un éditeur, une base de données, un tableur ou un programme de PAO, vous engendrez vous aussi, à chaque usage, une grande quantité de données. Oui sont stockees comme une suite d'octets dans des fichiers. L'un des critères de performance des ordinateurs est précisément leur aptitude à manipuler des volumes sans cesse croissants de données. Le disque dur des clones PC bon marché de milieu de gamme passe actuellement de 170 Mo à 330 Mo.

   Tout dépend de l'usage qu'on en fait. Moi, j'ai dû ajouter à mon PC un second disque dur de 170 Mo (j'ai pris un Conner à interface IDE) parce que mon fils avait sauvé trop de "films de cinémitrailleuse" dans le jeu X-Wing de Lucas Art (excellent jeu, mérite largement le détour). Mais peut-être avez-vous des usages plus sérieux pour vos disques.

   Quand on débute en informatique, il faut toujours se rappeler que les ordinateurs manipulent toutes les données comme des nombres. Ce sont les gens qui donnent à ces nombres des significations. Ainsi, les micro-ordinateurs utilisent tous le code ASCII (American Standard Code for Information Interchange, code américain standard pour l'échange d'informations). Ce code spécifie par exemple que la lettre A est représentée par le chiffre 65. Vous appuyez sur la touche A, l'ordinateur "voit" 65. Pour chaque type d'information, un codage, normalisé ou non, entre enjeu.

   Et c'est là qu'intervient la Seconde loi de Small. Si, comme c'est le cas pour beaucoup d'entre vous, vous manipulez beaucoup de données, vous la connaissez déjà intuitivement. Si vous n'avez pas encore trop bidouillé, vous ne tarderez pas à la voir se manifester...

Deuxieme Loi De Small
(dite "Loi du chaos grandissant")

"Dans un ensemble de données informatique, le désordre va touours en augmentant. Toute tentaive de réparation ne fait qu'augmenter encore le désordre."

En fait, cette loi affirme que les données informatiques ont toujours tendance à dégénérer et à se corrompre spontanément. Au bout d'un certain temps, vos bits bien ordonnés se sont mués en un chaos parfaitement aléatoire : vos données sont alors perdues. J'en vois qui sourient et qui haussent les épaules. Allez-y, moquez-vous ! Mais croyez-moi, en 21 ans, j'ai vu ce phénomène se manifester si souvent que je ne crois pas à un simple hasard. Comme dit le vieux dicton: "La première fois, c'est une coincidence, la deuxième, ça pourrait encore l'être, mais la troisième, c'est manifestement du sabotage."

   La Seconde loi se manifeste en particulier dans de très vastes volumes de données. Même dans des disques ou des bandes certifiées, des défauts apparaissent sous forme de "trous" dans la couche d'oxyde du média, trous dans lesquels "tombent" des bits malchanceux. Et parfois, le logiciel ne détecte pas ces bits manquants. Quand vous accumulez des tèraoctets de données, ce qui arrive assez vite dans les entreprises, vous marchez sur la corde raide.

   Tenez, le travail que j'ai fait la nuit dernière sur Spectre 3.1 en est un parfait exemple. À un cer tain moment, j'ai examiné le fichier principal (qui contenait jadis la totalité de Spectre, jusqu'à ce qu'il devienne beaucoup trop long, et que j'ai dû éclater en une vingtaine de petits fichiers et un gros fichier principal). Ledit fichier faisait 80 Ko. Impossible, me suis-je immédiatement dit, ce fichier devrait faire 400 Ko. J'ai chargé le fichier dans un éditeur, et naturellement, il se terminait au milieu d'une ligne. Les quatre cinquièmes du fichier avaient disparu, et impossible de savoir où et quand. Il me faut à présent fouiller dans mes sauvegardes, et en trouver une valide de ce fichier. Mais c'est un énorme problème: comment savez-vous si vos fichiers sont devenus défectueux ? Quand vous avez dix disques répartis sur de nombreuses machines, sans compter de nombreuses cartouches Syquest de 44 Mo, c'est un problème qui est loin d'être trivial. Je ne sais plus où se trouvent la moitié des fichiers que je suis sûr d'avoir "quelque part".

   Cette corruption d'un fichier vital, est-ce un accident ? Pas vraiment. En créant une structure de données informatiques, comme un fichier, vous allez à l'encontre des tendances profondes de l'univers : vous créez une structure non aléatoire. C'est jeter un défi à l'univers, qui se vengera tôt ou tard.

Thermodynamique

   La Seconde loi de Small dérive en fait de la seconde loi de la thermodynamique, qui dit que "l'entropie de l'univers ne peut que croître. " La thermodynamique est (plus ou moins> l'étude de la chaleur et des transferts de chaleurs et d'énergie. Quant à l'entropie, c'est une mesure du chaos, du caractère aléatoire, d'un système. La seconde loi de la thermodynamique dit que l'énergie utilisable dans l'univers ne peut que décroître. Qu'est-ce que l'énergie utilisable ? C'est celle qui découle d'un certain ordre, et que l'on peut utiliser en anéantissant cet ordre, donc en augmentant l'entropie.

   Prenons un exemple bien connu : il s'agit d'une expérience prouvant l'équivalence entre travail et chaleur. Vous prenez un baquet d'eau sur une table. Vous y plongez une roue à aube d'axe vertical, axe qui dépasse en haut du baquet. Sur l'axe de cette roue à aube, vous enroulez une ficelle qui est relié à un poids pouvant tomber de la table. Vous calfeutrez soigneusement le baquet et vous y mettez un thermomètre. Bon, maintenant, faites tomber le poids. Il tire la ficelle, qui fait tourner la roue à aube. En tournant, les aubes agitent l'eau, y créent des frictions et la réchauffent. Le thermométre montre une élévation de température. Le travail fourni par la chute du poids échauffe l'eau, d'où travail égale chaleur, c'est-y pas beau la science, hmmm ?

   Mais si vous faites chauffer l'eau, les pales ne se mettent pas à tourner. Tiens donc, l'équivalence est donc à sens unique ! Pourquoi ? Parce qu'en consommant du travail pour faire de la chaleur, vous augmentez l'entropie (vous ajoutez du chaos a l'univers), ce qui est permis. Mais prendre de la chaleur et en faire du travail, cela ferait diminuer l'entropie, et ça, c'est Niet! Sinon, les bateaux pourraient naviguer en extrayant leur énergie de la chaleur de l'océan et en laissant derrière eux un sillage de glaçons...

   Ce qui est par contre autorisé, c'est d'utiliser une différence de température pour produire un travail. Les pales immergées dans l'eau sont toutes à la même température, et donc, pas de différence à utiliser. Mais si maintenant, vous les mettez dans un jet de vapeur, avec de l'eau chaude d'un côté et un refroidisseur de l'autre, ça marche, les pales tournent. En augmentant l'entropie. Car là aussi, vous détruisez de l'ordre. Vous aviez de l'eau chaude d'un côté (la source de vapeur), de l'eau froide de l'autre (le refroidisseur), et vous faites tendre les deux vers une tiédeur uniforme et insipide. Et cette eau tiède ne se scindera pas spontanément en une masse d'eau chaude et une d'eau froide : quand le désordre s'installe, on ne le chasse pas Si facilement. Si vous prenez un litre d'eau a 100 degrés et un à 0 degrés, vous avez la même énergie que dans deux litres d'eau à 50 degrés. Mais dans le premier câs, cette énergie est utilisable en partie, grâce à la différence de température. Dans l'autre, elle ne l'est pas.

   Ça va, vous suivez ? Bravo, vous venez juste d'avaler votre première leçon de thermodynamique.

   Le destin ultime de l'univers sera peut-être, dans 15 milliards d'années, une température uniforme partout, sans source de chaleur, sans la moindre différence de température à utiliser, une entropie maximale. Heureusement, des gens comme Stephen Hawking affirme que l'univers est suffisamment dense pour que ce jour n'arrive jamais : d'ici là, il se sera de nouveau contracté jusqu'à ce que survienne un nouveau Big Bang. Et il y a aussi la théorie de la création continue de matière, qui dérive de la physique quantique, et qui rend suffisamment bien compte de l'état actuel de l'univers pour être prise en considération, et qui dit que l'univers est en expansion et en création continue. (Votre choix dépend en grande partie de votre religion.)

Barrage

   Le concept de différence de température pouvant produire de l'énergie est parfois délicat a appréhender. Aussi, permettez-moi de vous proposer une analogie, celle du barrage hydro-électrique. Un barrage, c'est un mur de béton retenant de l'eau. Au pied du barrage se situe le lit original du cours d'eau barre. Les ingénieurs installent un énorme tuyau entre le lac artificiel et le lit de la rivière, et ils y intercalent une turbine. L'eau s'engouffre dans cette "conduite forcée" à une pression énorme, et fournit une énergie considérable à une turbine, qui fait tourner un alternateur produisant de l'électricité. On parle souvent de "production d'énergie", mais jamais de création. La première loi de la thermodynamique dit qu'on ne peut créer de l'énergie, et qu'on ne peut qu'en transférer (ici, entre l'eau et le générateur électrique). La pression est d'autant plus forte que le niveau d'eau est plus haut dans la retenue. On exploite en fait la différence de hauteur entre le lac artificiel et le lit du cours d'eau pour extraire de l'énergie.

   Mais imaginez qu'une sécheresse fasse baisser le niveau du lac à un point tel qu'il n'y ait plus de différence de niveau entre le lac et le lit original. Plus de différence de hauteur, plus moyen d'extraire l'énergie de l'eau.

   À ce propos, Si vous avez l'occasion de visiter un barrage hydroélectrique, ne vous en privez pas. J'ai eu l'occasion de visiter le Hoover Dam, pas très loin de chez moi. Le clou de la visite est le moment où l'on monte sur l'énorme conduite amenant l'eau aux turbines, où rugissent les torrents d'eau qui s'y engouffrent depuis le sommet du barrage. On éprouve alors la méme sensation que dans une fusée qui décolle, avec toute cette énergie brute qui circule sous vos pieds... C'est le genre d'effets spéciaux que les cinéastes voudraient bien arriver à créer lorsque l'Enterprise fonce à vitesse maximum. mais ils sont loin du compte comparés à cette force naturelle. Le Hoover Dam est, a mon avis, une des merveilles du monde, car il montre ce que les hommes sont capables de créer quand ils ont le courage de le faire et qu'on ne les enquiquine pas à leur faire remplir des formulaires de l'Agence 'pour la protection de l'environnement. (De nos jours, les lois sur l'impact sur l'environnement interdiraient ce genre de projet.)

Réserve d'énergie

   Autre exemple: une pierre chauffée au feu représente une réserve d'énergie parce qu'elle est plus chaude que son entourage, et peut donc rayonner de l'énergie sous forme de chaleur. Cette différence est ce que les scientifiques nomment parfois "un delta", symbolisé par un triangle. Si vous laissez la pierre se refroidir (en réchauffant la pièce), la pièce et la pierre se trouvent à la même température, et l'entropie est maximale. La situation n'évoluera plus. Le delta est devenu nul.

   Tout ceci s'applique parfaitement à l'informatique. Prenez un disque dur de ST absolument parfait. La table des partitions et les deux tables d'allocations de fichiers de chaque partition sont parfaitement en ordre, et, pour peu que le disque ait été défragmenté par un utilitaire adéquat, les fichiers sont tous sur des secteurs consécutifs, sans intervalle vide disgracieux. Enfin, tous les fichiers sont lisibles, et contiennent bien ce qu'ils sont censée contenir. (Je ne suis même pas sûr d'avoir un jour entrevu pareil spectacle édénique. Mais c'est assurément la façon dont les choses devraient être.)

   Toutes ces données sur votre disque dur sont, pour reprendre mon analogie, similaire à un barrage rempli à ras bord. Le potentiel (le delta> est à son maximum. et l'énergie accumulée est énorme.

   Si la seconde loi de la thermodynamique s appliquait à ce disque, vous auriez une situation très instable. Vous auriez un haut niveau d'énergie (le disque bien ordonné) dans un environnement à bas niveau (l'état naturel chaotique de l'oxyde sur le disque). Et de même que l'eau n'attend que la moindre fissure pour s'écouler, en détruisant le barrage si nécessaire, vos données n'attendraient que la moindre occasion pour retourner au chaos primitif, en bousillant votre disque au passage.

   Car l'état naturel de l'univers est le chaos. Et l'état naturel des données est le hasard total. Un disque à peine fabriqué n'est pas naturellement formaté. Les particules magnétiques y sont orientées dans tous les sens, sans qu'on puisse y distinguer le moindre ordonnancement. Or, le disque dur soigneusement rempli est à un état minimal d'entropie. ce que l'univers déteste, comme l'explique la seconde loi de la thermodynamique.

   Et je vous garantie que dès que vous accédez à votre beau disque parfait bien propre, celui-ci s efforcera de retourner à l'état sauvage au plus vite, nivelant le delta, par un plantage si nécessaire. C'est ce comportement, maintes fois observé empiriquement, qui est formalisé dans ma Seconde loi.

   Ne croyez pas que l'analogie entre un haut niveau d'organisation des données et un haut niveau d'énergie soit tirée par les cheveux. En fait, c'est à peu près ce que dit la troisième loi de la thermodynamique. Appliquée aux structures cristallines (c'est-à-dire des molécules organisées en grilles, comme le diamant), elle dit que l'univers ne les apprécie guère, et préférerait voir ces molécules retourner à l'état de bouillie informe. Si vous prenez un cristal et que vous le chauffez, vous allez obtenir cette bouillie en disloquant les grilles, et vous allez augmenter l'entropie de la substance en question. Or, qu'est-ce qu'une structure de données, sinon un agencement de particules magnétiques sur un support, particules qui sont naturellement en désordre ? C'est l'équivalent logiciel d'un cristal. L'entropie ne peut que croître, le cristal ne peut que se disloquer, les données ne peuvent que se corrompre. Ce qui est une façon scientifique de dire: "La vie est une chiennerie, et en plus, quand vous crevez, la nature applaudit."

J'ai voulu violer la loi

   Je vous donne des conseils, je vous dis que ma Seconde loi est intuitivement évidente, que je l'ai toujours su... En fait, en un instant d'égarement et de na&iulm;veté, j'ai tenté de la violer, avec le brillant succès qu'on imagine. Que je vous raconte.

   Il y a quelque temps, j'ai décidé que les différentes versions de la vingtaine de fichiers de Spectre 3. 1 commençaient à devenir ingérables. L'horodatage des fichiers par l'horloge interne du ST ne marche pas très bien pour moi (pour une raison que j'ai mis un bon bout de temps à découvrir). Et souvent, il me fallait aller compulser les différentes versions d'un fichier pour savoir laquelle était la bonne, la dernière! J'ai alors décidé, bètement, sans réfléchir, de créer le disque dur parfait bien propre. J'ai donc pris un disque neuf mais déjà rodé, qui avait assez tourné pour avoir dépassé le stade de la mortalité infantile. Et j'ai commencé à mettre chaque fichier à l'endroit approprié, accompagné de commentaires et de documentations. J'ai créé des dossiers, un par version de Spectre: "1.51", "1 .75","1.9F","2. 3K", "2.65", "2.65C", "3. O", "3.1Dev", plus toutes les versions intermédiaires que seuls ont vues les bètatesteurs. (Chaque saut de numéro de version constitue autant de sueur et de larmes passées en test et en dèbogage).

   Pendant des jours et des jours, j'ai fouillé dans mes disquettes et mes cartouches Syquest. J'ai exhumé de vieilles versions, les ai vérifiées, copiées dans les bons dossiers. Un boulot fastidieux et rébarbatif où j'ai dépensé beaucoup d'énergie et de Pepsi.

   Dans chaque dossier, j'ai tout vérifié en assemblant les fichiers et en recréant la version correspondante de Spectre, que j'ai ensuite comparée aux disques de productions, dont Sandy a été assez maligne pour garder un exemplaire pour chaque version, me faisant menacer des pires châtiments si je ne les lui rendais pas promptement. Et chaque dossier a ensuite reçu un fichier de documentation.

   Etais-je sot : j'ai même poussé le vice jusqu'à inclure sur ce disque les 19 versions bêta de Spectre 3. O. Puisque j'étais en train de faire LE disque parfait, autant les y mettre, n'est-ce pas ? Après tout, certaines applications Apple avaient montré une fâcheuse propension à tourner sur une version bêta mais pas sur la suivante (comme Pagemaker qui s'était mis à planter sur l'avant-dernière version bêta de Spectre 3. 0 -un mauvais souvenir, il nous a fallu supprimer ce bogue en un temps record).

   J'ai aussi récupéré ici et là des fichiers divers, comme des docs sur le clavier du Macintosh et les codes qu'il émettait. Comme les autres, il aboutirent dans des dossiers soigneusement documentés. Inutile de dire que tout cela a pris un grand nombre de mégaoctets.

   Pour être sûr d'éviter les corruptions spontanées de fichiers, j'ai passé les fichiers à l'utitaire ARC. ARC compresse les fichiers, mais surtout, il calcule un CRC (Cyclic Reduncant Check, somme de contrôle redondant cyclique) pour chaque fichier. Il s'agit d'une sorte de signature du fichier, obtenue en calculant un polynôme avec chaque octet du fichier. Modifier un simple bit ou intervertir deux octet modifie le CRC, et il est presque impossible de modifier accidentellement le fichier en conservant le même CRC. J'ai donc fait une liste de tous les fichiers avec leur CRC. En cas de doute sur l'intégrité d'un fichier, je pouvais recalculer son CRC et voir s'il correspondait à celui de la liste.

   Enfin, j'ai relancé un programme qui recalculait le CRC pour chacun des 1500 fichiers et le revérifiait par rappon à la liste. J'ai imprimé les fichiers de documentation pour en conserver une version sur papier.

   Poussant un soupir satisfait, je me suis étiré. empli de la béatitude du devoir accompli. Je savais où se trouvait chaque fichier à cette seconde précise, et était certain de son intégrité. Il ne restait plus qu'a faire une sauvegarde de ce petit bijou d'ordre et de rigueur, qu'il m'avait fallu un bon mois pour fignoler...

   En organisant ainsi tant de données, j'avais naturellement rempli mon barrage à ras bord, créant une situation d'entropie minimale et d'organisation maximale. J'avais défié les lois du chaos et violé la seconde loi de la thermodynamique appliquée à l'informatique. J'avais construit un château de cartes de vingt mètres de haut.

   L'univers n'attendait que l'occasion de m'apprendre à vivre. Notez bien qu'avec l'astuce des CRC, le coup classique de la corruption sournoise des fichiers devenait impossible, car j'aurais pu le détecter. Il ne restait plus qu'une possibilité.

   Comme vous le savez si vous avez lu mon article précédent, les lois de l'univers qui le vouent au chaos se mirent en oeuvre par l'intermédiaire de la mécanique quantique, et engendrêrent un continuum spatio-temporel dans lequel était inscrit mon tragique destin. Le destin en question consistant bien sûr à recevoir le fameux château de cartes sur la tête afin de niveler cet arrogant delta de haute organisation.

   Innocemment, j'ai éteint le systême pour y connecter un lecteur de bande magnétique. J'ai mis le lecteur et j'ai rallumé.

   Le disque dur n'a pas réagit l'allumage.

   Mes cheveux se sont dressés sur ma tête et j'ai été pris de sueurs froides.

   Pendant une semaine, j'ai tout essayé pour ressusciter ce disque. J'ai remplacé son circuit imprimé interne, son alimentation, je l'ai fait tourner à la main, je l'ai secoué pour décoller les têtes, enfin tout. En vain. Il était mort. Et je n'avais pas de sauvegarde. C'était la seule possibilité, elle s'était réalisée. Le delta avait été nivelé d'un coup. Paf.

   Meuh non, dites-vous, j'ai malencontreusement envoyé une décharge d'électricité statique a ce pauvre disque, ou alors c'est le câble SCSI qui n'était pas bon, ou encore l'alimentation qui a claqué a l'allumage et a bousillé le disque... Ben voyons. Non, désolé, ça ne prend plus, les coïncidences, j'en ai trop vues. C'étaient les lois inexorables de l'univers qui venaient de frapper.

   Depuis lors, j'ai pris l'habitude de ne jamais faire d'effort pour organiser mon disque dur. Oh, certes, je sais plus ou moins où sont mes fichiers, mais je me garde bien de trop augmenter mon niveau d'organisation, et d'attirer l'attention des implacables gardiens des lois de l'entropie. En outre, je laisse toujours une partition a l'état de chaos complet sur mon disque. Ce sacrifice aux dieux du désordre m'a jusqu'à présent évité leurs foudres.

   Je sais, je sais, ça a l'air idiot. Mais en tout cas, ça marche. Mon taux de pannes de disques est a son niveau historique le plus bas. Un de mes lecteurs, un Syquest souffrant d'un probléme de moteur de rotation, a même eu l'extrême obligeance d'avoir une embellie finale et de se remettre a fonctionner, ce qui m'a permis d'y récupérer des mégaoctets de données prises sur des serveurs télématiques, au prix d'innombrables heures de téléchargement. Le Syquest a ensuite définitivement rendu l'âme, cinq minutes après que j'y ai récupéré le dernier fichier. De quoi se poser des questions, non ?

   Tout ceci a des implications qui m'effraient. Je constate que les concentrations de données souffrent. C'est peut-être dû en partie aux limites de la technologie que l'on repousse sans cesse. Même avec un taux de fiabilité de 99,9%, il y a un gars sur mille (moi!) à qui échoient les rebuts. Certes, Atari ne teste pas ses machines à 100%, ce qui est reflété par leur prix modique. Mais j'ai aussi trouvé des fichiers corrompus sans raison apparente sur des 486 ou des Macintosh fort coûteux. Tenez, prés de chaque Mac, nous gardons un kit d'installation, parce que nous devons régulièrement recharger le System et le Finder...

Stockage visible

   Mon seul espoir est notre lecteur de disque WORM (Write Once, Read Many) connecté à une vieille machine AT&T. C'est un disque sur lequel tout ce qu'on écrit est définitivement enregistré, littéralement gravé au laser. Mais tôt ou tard, ce lecteur tombera en panne, ou bien ce sera l'AT&T. Les circuits imprimés ont une limite d'âge de dix ans. Passé ce temps, des fissures commencent à y apparaître en raison des trop nombreux cycles thermiques (échauffement t l'allumage, refroidissement â l'extinction) qui dilatent et contractent les pistes de cuivre dans les cartes. Je suis persuadé que si cela devient un jour nécessaire, un élément irremplaçable tombera en panne, me privant du disque WORM.

   J'en viens à considérer des médias où l'information est stockée sous forme visible, macroscopique, comme les bandes de papier perforées. Les bits sur les surtaces magnétiques sont sujets aux aléas de la physique quantique, dont les trous des bandes de papiers n'ont cure. Les lecteurs de bandes à haute vitesse sont assez rapides, et se trouvent dans les surplus pour un prix dérisoire.

   En tout cas, évitez comme la peste de bâtir comme moi des châteaux de cartes informa tiques, des disques durs hyper-organisés vous attireriez immanquablement quelque catastrophe. Ne hissez pas votre potentiel d'ordre trop haut, vous vous feriez remarquer. Ne soyez pas le cristal que l'univers brûle de faire fondre. Et n'oubliez pas que les Seigneurs du Chaos aiment qu'on leur consacre une zone délibérément laissée à l'état sauvage sur un disque dur.

   Il faut également que vous sachiez qu'à partir de 20 Mo de données, vous avez au moins un fichier vérolé. Pouvez-vous trouver lequel ? Non, hein ? J'en étais sûr.

   Rassurez-vous, vous n êtes pas les seuls. Les publicités d'utilitaires pour Macintosh affirment que 500A des Macs souffrent de répertoires vérolés. Les Macs utilisent non pas une simple table de répertoire, mais une structure arborescente complexe, un Bqree, qui peut facilement être endommagé. Si vous avez un Spectre, procurez-votis les Norton Utilities pour Mac, vous en aurez besoin.

   Quant aux PC... Une fois, je rassemblais d'anciens articles pour une disqueffe destinée à ST-Mag, quand soudain, au milieu d'un article que je relisais, je vis apparaître des données binaires venues de Dieu sait où. L'original avait disparu. Heureusement, un ami avait gardé une copie de cet article, et j'ai pu finalement envoyer cette disquette. [NdT : Rassure-toi, Dave, les Postes nous l'ont paumée, tu n'as plus qu'a la refaire. Eh Si.]

   Bret n'allez pas à l'encontre des lois de l'univers, ou il vous en cuira Écoutez vos anciens, jeunes présomptueux. Ils ont souffert pour vous. Faites comme moi: suivez le courant, prenez vos dispositions, sinon vous vous en mordrez les doigts

Traduction et adaptation Password 90


Date de création : 16/02/2015 : 09:12
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