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Qui est vraiment Jerry Pournelle? STM 74

 PAR DAVID SMALL De nombreux lecteurs de ST-Mag lisent également le magazine américain Byte, réputé pour sa qualité. Et la chronique la plus lue de Byte est celle de Jerry Pournelle. Pournelle est un écrivain de science-fiction qui possède un solide bagage en informatique et en haute technologie. Il appartient à un comité qui conseille le gouvernement américain sur la politique spatiale. Il est également docteur en psychologie et ancien ingénieur. Pournelle a la chance de pouvoir essayer les tout derniers programmes et machines de l'industrie, que les firmes se battent pour lui faire tester. Encore que cette chance soit parfois une malédiction, car le succès de ses articles fait de Pournelle un personnage aussi harcelé par les fabricants de micro-informatique que le Prince Charles par les lournalistes. Pournelle serait-il un de ces nantis conformistes ne jurant que par leur PC ? Pas du tout! Dave nous décrit ce personnage haut en couleur du monde de la micro-informatique.

Un auteur à succes

   Beaucoup de gens lisent les revues américaines d'informatique Byte et lnfoworld. Dans ces deux revues paraissent des chroniques de Jerry Pournelle. Ces articles sont remarquables, parce qu'ils n'hésitent jamais àprendre des positions controversées, ce qui détonne dans le ron-ron ambiant.

   Davantage de gens encore lisent des romans de science-fiction. Et parmi les amateurs de SF, le nom de Jerry Pournelle est bien connu. [NdT pour de sombres raisons de bisbille entre agents littéraires, équivalents des imprésarios pour les romanciers, les romans de Jerry Pournelle ne sont pas traduits en français, à l'exception de "La poussière dans l'oeil de Dieu", ce qui est regrettable.] Il a écrit des romans qui ont renouvelé le genre, comme la série des "Janissaries" (4 tomes parus), et a également collaboré avec Larry Niven, coauteur de plusieurs autres titres.

   Lorsque l'ai sorti mon premier émulateur Mac, Jerry fut l'un des premiers à en parler, et c'est en grande partie grâce à son soutien que l'ai pu le terminer. Nous n'avions pas d'argent pour en faire de la publicité, et personne ne se doutait qu'il était possible de faire tourner des programmes Mac sur un ST. Mais grâce aux articles de Jerry, des clients potentiels nous ont contacté, et nous avons su qu'il y avait un marché pour cet émulateur, ce qui justifiait nos efforts et nous a poussé àen finir la mise au point. J'ai régulièrement envoyé à Jerry les mises à jour du produit, et l'ai souvent rencontré lors de salons informatiques, ce qui m'a permis de garder le contact avec les Pournelle.

   Aussi, quand on parle de Jerry (c'est un sujet qui revient souvent dans l'univers de la micro), on me demande pourtant qui il est vraiment. C'est pourquoi je souhaite vous présenter ce personnage exceptionnel.

Un sain anticonformisme

   Tout d'abord, dans une industrie où les personnalités marquées sont rares et où le conformisme est de rigueur, Jerry s'impose comme une tâche de couleur dans un monde de grisaille. Par exemple, dans un salon informatique de San Francisco bourré de costards trois pièces, il débarqua une fois en tenue camouflée de brousse, avec un sac publicitaire du magazine "Soldier of Fortune" [NdT magazine pour baroudeurs et amateurs d'attirail militaire, très anticommuniste].

   Cela provoqua quelques haussements de sourcils (aimable litote). Je ne voudrais pas entrer ici dans un débat politique, mais il vous faut savoir que dans la région de San Francisco, la presse informatique est mise en coupe réglée par un réseau d'activistes aux idées très marquées à gauche, et qui favorisent par cooptation uniquement des gens partageant leurs idées. Cela remonte au noyau universitaire des premiers bidouilleurs qui innovèrent dans la micro. Le magazine informatique "Dr. Dobbs" avait par exemple publié en 1987 un article où l'auteur doutait qu'il soit moral de programmer pour une firme en rapport avec l'industrie militaire (l'auteur affirmait ne vouloir travailler sur des projets liés à la défense nationale que si la moitié de son salaire était donné à des mouvements pacifistes.)

   Or, déplaire à ces gens est généralement suicidaire pour un écrivain ou un journaliste. Ils vous blackboulent, puis donnent votre place à un gratte-papier plus docile d'opinion. Et la profession grouille de gens avides d'écrire des articles...

   Par son anticonformisme, Jerry ne fait donc pas qu'apporter un peu de fantaisie, il prend aussi des risques.

Une voix de stentor

   Si vous rencontrez Pournelle pour la première fois, attendez-vous à un choc. Ses articles sont d'un style calme, aimable, posé, du genre "notre ami Pournelle nous parle d'informatique". Et là, soudain, vous vous retrouvez face à un gars arborant un badge du magazine Byte, en tenue camouflée, et qui hurle dans vos oreilles !

   C'est que Jerry a fait la guerre de Corée dans une unité d'artillerie. Il s'est retrouvé au mauvais moment (le début) dans un sale coin, où les troupes US ont bien failli se faire rejeter à la mer. Son unité a fait feu jour et nuit, et son ouïe en a été atteinte. Depuis, comme tous les gens qui n'entendent pas bien, il parle très fort.

   Je me souviens qu'une fois, lors d'un salon, peu de temps après avoir fait sa connaissance, j'avais timidement parlé àJerry de mon émulateur Mac, encore en cours de conception. Et, ô joie, Jerry avait accepté d'y jeter un oeil une fois qu'il serait prêt, alors qu'il était très sollicité. Je lui avais demandé de me dédicacer un de ses livres, puis m'étais éclipsé pour aller au toilettes. Et tandis que j'étais face à un urinoir, vidant consciencieusement ma vessie, Jerry était entré sans bruit derrière moi, et, m'apercevant, me lança de sa voie retentissante: "VOTRE LIVRE EST PRET, MONSIEUR SMALL !!!" Je sursautai, et eu le réflexe stupide de me retourner. Je manquai de peu d'asperger les chaussures de Jerry, ce qui, je le crains, aurait marqué la fin de ma carrière en informatique...

   Autre chose frappante chez Jerry son regard. J'ai essayé de trouver les mots exacts pour le décrire, mais je crains d'avoir échoué. C'est un regard perçant, insistant, précis, que je n'ai vu que chez de très rares personnes. L'une était un très bon chasseur en compagnie duquel j'ai fait quelques randonnées. Une autre est mon beau-père, pilote d'essai qui risqua sa peau sur les prototypes des SR71 Blackbird. Un tel regard ne se trouve apparemment que chez les gens qui ont passé des heures à scruter le paysage sous le soleil, ou à vérifier des instruments de vol pour la millième fois... Lorsqu'on se retrouve sous le feu de ce regard, on a un peu l'impression d'être mentalement disséqué.

Horreur des idiots    Ensuite, Jerry, je le cite, a "horreur des idiots". Une fois, j'ai vu deux adeptes du pacifisme le chapitrer au sujet des armes nucléaires. Ils avaient l'air sincère et dévoué de ces gens qui font du prosélytisme en porte-à-porte pour leur religion.

   Ces gens ont tenu le coup environ une minute. C'est que si vous apportez la contradiction à Jerry, vous avez vraiment intérêt à vérifier vos arguments, à les étayer de faits irréfutables, et à les appuyer par un raisonnement sans faille. Sinon, vous vous faites descendre en flammes. Car Pournelle écrit des romans de sciencefiction "réaliste", plutôt de l'anticipation donc, et les fanas du genre se font un malin plaisir de souligner les failles d'une histoire mal ficelée et d'éreinter son auteur. Tenez, à propos de son livre "Le marteau de Lucifer", un critique écrivait "Le problème avec la planète où se passe ce roman est qu'un monde de cette taille, à faible gravité, ne pourrait pas retenir une atmosphère à base d'oxygène et d'azote.") On trouve beaucoup de ces fanas intransigeants dans le monde des bidouilleurs et des technocentristes, entre autres.

   Avec un public aussi exigeant, Jerry est habitué à vérifier très soigneusement ses arguments. Ni les mordus de SF, ni les lecteurs de Byte ne l'autoriseraient à se laisser aller à ses sentiments ou à des raisonnements bancals. Face à cet esprit méthodique, il est dangereux de se lancer dans de grandes envolées emphatiques. Sinon, le regard vous transperce, la voix vous indique en phrases nettes et tranchantes les déficiences de vos arguments, et vous vous sentez comme un gosse qui vient de cafouiller dans la table de multiplication devant la maîtresse.

   A vrai dire, ce n'est pas tout à fait ce que l'on enseigne dans les cours de relations publiques ou dans les livres "comment se faire des amis". En théorie, il devrait poliment écouter ses contradicteurs, exposer son avis, écouter le leur patiemment, les remercier d'avoir pris le temps de le sermonner, et les quitter sur un sourire. Alors qu'en pratique, il se contente de leur poser quelques questions précises pour voir s'ils maîtrisent leur sujet, et dans le cas contraire, il les laisse en plan sur-le-champ.

   Cette brusquerie est cependant nécessaire pour quelqu'un qui, comme lui, est constamment sollicité à tout propos. Il reçoit toutes sortes d'appels téléphoniques d'attachés de presse de firmes informatiques bien décidé à lui vanter leur nouveau produit et à lui arracher quelques paragraphes élogieux dans son prochain article. Si vous avez déjà été dérangé par un coup de fil d'un vendeur de cuisines ou de polices d'assurances; vous connaissez ce genre d'importuns. Jerry est sans cesse pris à parti par tout un tas de dévots qu'il a offensé en n'encensant pas leur produit favori, et qui sont bien décidés à lui faire entendre raison. Or, toutes ses activités informatiques ne sont qu'une occupation secondaire : Pournelle est avant tout un écrivain d'anticipation, qui a besoin de longues heures de calme, sans être dérangé par la sonnerie du téléphone.

   J'ai pour ma part subi quelques appels à sept heures du matin ("Comment, vous n'êtes pas debout, M. Small ? Mais il est neuf heures sur la côte est !"), de préférence après de longues sessions de bidouille nocturne, ce qui m'a conduit à me faire inscrire sur liste rouge. Je ne peux donc qu'approuver Jerry.

   C'est pourquoi la brusquerie est pour lui une indispensable défense naturelle. Si vous prenez le temps d'apprendre à le connaître, Si vous lui montrez que vous n'êtes pas un idiot, et que vous n'essayez pas de le convertir àquelque noble cause, sa vraie nature se rêvélera : celle d'une personne charmante. [NdT un tuyau, appelez-le "docteur Pournelle" - il est docteur es psychologie - pour l'amadouer.]

   N'allez pas croire qu'il réserve ses bons côtés à ceux qui partagent ses opinions politiques. Jerry est rédacteur-en-chef d'un magazine qui parait sous forme d'un livre de poche plusieurs fois par an, et qui contient des articles de gens de toutes opinions, y compris opposées aux siennes. Mais ces gens ont en commun de connaître leur sujet à fond et de savoir raisonner.

Les causes sacrees

   Jerry n'aime ni le battage publicitaire, ni les causes "religieuses". Un sain réflexe pour un journaliste, car notre industrie abonde en produits et firmes surmédiatisées ! Prenons par exemple le Macinstosh. Sa sortie s'est accompagnée du plus énorme tapage commercial, de la plus gigantesque campagne de "relations publiques" - qui est l'art d'obtenir de la pub gratuite - jamais menés pour un microordinateur. Cette campagne a payé quantité de gens sont allés acheter un ordinateur avec à peine 128 Ko de RAM, un écran minuscule, et un lecteur de disquette quasiment occupé à 100% par les fichiers système. Des magazines ont été lancés rien que pour le Mac. La pression commerciale était énorme Apple a même fait passer des pubs frappantes à la télé durant la coupe du monde de football américain.

   J'avoue avoir été l'un de ces idiots utiles, comme les propagandistes appellent ceux qui suivent leurs campagnes. J'ai acheté mon Mac au printemps 1984, et j'ai passé l'été, comme tout le monde, à attendre que des logiciels daignent se matérialiser entre deux campagnes de promotion. Celles-ci étaient menées de main de maître. Je me rappelle par exemple que dans le magazine MacWorld paraissaient des tests de produits absolument inexistants. Finalement, la carte d'extension mémoire de 512 Ko est sortie, ainsi que le logiciel Excel de Microsoft, et la machine a enfin commencé à être utilisable.

   Jerry s'était à l'époque attiré les foudres de nombreux mystiques du Mac, en les appelant la "tribu du Mac", et en remarquant qu'il n'y avait aucun logiciel pour la machine, que l'écran était petit, qu'elle manquait de mémoire et ainsi de suite.

   Mais il est plus facile de convaincre quelqu'un de changer de religion que de convertir un véritable adepte de tel ou tel ordinateur. Et Apple a toujours été suivi par une large masse de partisans aveuglément loyaux, qui achètent (notez le mot-clé, "achètent") la contre-culture qui est associée à l'image de la firme. Ils achètent également ("achètent", encore, notez) les magazines sur le Mac, achètent (vous notez, hein 7) les derniers périphériques pour le Mac, etc. Du coup, vendre de la contre-culture, cela n'a plus rien à voir avec le négoce de quelques colifichets psychédéliques c'est une affaire extrêmement juteuse.

   Quand le Mac eut finalement assez de mémoire et d'espace disque pour être utilisable, Jerry se laissa d'ailleurs fléchir et en fit usage volontiers. Néanmoins, quand il parla dans un article de notre premier émulateur Mac, il fut inondé de lettres d'insultes de la tribu du Mac, qui s'était offusquée de notre sacrilège. Comment avait-il seulement osé mentionner cette cartouche blasphématoire ? Mais vous devez commencer à vous douter de la façon dont Jerry "ose" faire quoi que ce soit.

Pas peur des controverses

   Sachez donc que (chose rare pour un journaliste) Pournelle n'hésite jamais à soutenir des causes impopulaires ou à susciter des controverses. Il méprise le terrorisme intellectuel. Son sac "Soldier of Fortune" (SOF) en est l'illustration parfaite. Il faut du courage j'ai osé une fois porter un T-shirt SOF à la Foire informatique de la côte Ouest, salon informatique branché s'il en est, qui se tenait à San Francisco. C'était juste histoire de rire le lendemain, je portais bien mon T-shirt "Gary Hart président" que m'avais donné mon associé d'alors [NdT : Gary Hart était un candidat démocrate à la présidence.] Qu'ai-je entendu pour avoir porté ce T-shirt SOF ! On m'a fait de grandes leçons de politique. En plein salon, un type maugréait : "Assassins ! Tous des assassins !" Etrange notion de la liberté d'opinion.

   Parmi ces fanatiques court la rumeur que Jerry Pournelle écrivait jadis pour Soldier of Fortune. Or, contribuer à une revue maudite par les "faiseurs d'opinion", c'est pire qu'être un auteur mis à l'index par l'inquisition. En tout cas, cela vous attire la réprobation immédiate des zélotes, qui arborent alors des mines indignées et vous traitent de "meurtrier", ou de l'infamant "mercenaire", comme j'ai pu en faire l'expérience moi-même.

   Eh bien, qu'ils soient rassurés : la rumeur est absolument exacte ! Mais avant qu'ils ne défaillent d'horreur, je précise que Jerry est grand amateur de simulations guerrières, d'analyse tactique et autres wargames, comme le savent les lecteurs de ses articles dans Byte. Ce qui est tout à fait dans les sujets couverts par S0F. Ne nous y trompons pas si cette revue se veut "le magazine des aventuriers professionnels", comme le clame son slogan de couverture, ses lecteurs sont souvent des aventuriers en chambre. Sous cette couverture racoleuse, que trouve-t-on ? Des articles plutôt anodins, comme "Comment nettoyer votre fusil", "Comment aiguiser votre couteau", ou encore "Les souvenirs d'un vétéran du Vietnam". Rien qui le démarque franchement des myriades d'autres journaux tournant autour des armes ou des militaires. Jerry leur a fourni des articles parlant de stratégie militaire. La belle affaire. Alors, ces glapissements effarouchés de sectateurs indignés sont-ils justifiés ? Sont-ils seulement sincères ? (Si ça peut les rassurer, Jerry a depuis longtemps cessé d'écrire pour eux, il trop occupé par ailleurs).

Loyauté

   S'il y a un comportement qui est considéré comme démodé, c'est bien la loyauté. Et pourtant, si vous prenez le temps de le connaître, et si vous en faites un ami, Jerry sera toujours loyal envers vous. Cette attitude surannée, vous en conviendrez, ne peut lui attirer qu'un mépris hautain dans les milieux "branchés" où il faut être vu au dernier cocktail en compagnie des faiseurs de prêt-à-penser dernière mode. Dans ces cercles élégants, la modernité semble nécessairement devoir s'accompagner d'une mentalité de rat d'égout où le grand chic est de piétiner des gens qui vous ont fait confiance. A cela s'ajoute, dans notre industrie, un pesant conformisme et un étouffant terrorisme intellectuel qui se révèlent lors de chaque débat, que ce soit la guerre des langages (Pascal contre C contre Basic), la guerre des machines (Mac contre PC) ou les guerres politiques (vous avez l'embarras du choix).

   Dans ce panier de crabes, Jerry surprend agréablement, et j'ai moi-meme été témoin d'un exemple de sa loyauté. La femme de Jerry, Roberta, avait en 1986 un projet de programme d'apprentissage de la lecture. Jerry avait passé un accord avec un bidouilleur sur ST, un nommé Alex Leavens, pour réaliser ce programme. Alex prit un bon départ, puis s'enlisa dans un énorme retard. Il avait de gros problèmes personnels qui lui prenaient presque tout son temps. Alex accumula des mois et des mois de retard, et j'étais quasiment certain que Jerry finirait par se lasser et embaucherait quelqu'un d'autre pour terminer le programme. Il était parfaitement en droit de faire, et cela aurait fait sortir le programme bien plus tôt. Mais à ma grande surprise, Pournelle ne le fit pas, et Alex parvint finalement à finir le projet. L'aide de Jerry lui fut précieuse en une période critique de sa vie, et c'est sans doute ce qui lui a permis de s'en tirer.

   Autre exemple, Jerry fait partie de ces auteurs qui savent témoigner de leur reconnaissance à leurs assistants pour le gros travail de relecture qu'imposent leurs romans. Dans son dernier livre, la page de garde comporte ainsi des remerciements pour certaines de ces petites mains de l'édition, qu'ignorent superbement la plupart des écrivains. Après tout, cela fait partie du travail de ces gens, n est-ce pas...

   Puisque nous parlions de Mme Roberta Pournelle, permettez-moi de vous la présenter. Roberta est une rousse exubérante (et qui ne s'offense pas d'être ainsi décrite, sans quoi je ne me le permettrais pas !) qui a à son actif une brillante carrière d'institutrice dans la région de Los Angeles. Les élèves qu'on lui envoie sont ceux que le système juge irrécupérables. Ils lui arrivent avec des kilos de paperasses expliquant pourquoi ils ne peuvent apprendre à lire "dyslexique", "enfant à problème", etc...

   L'approche de Roberta est de mettre la paperasse au panier et d'apprendre à lire aux gosses. Elle a jusqu'à présent un taux de réussite de 100%. Cela demande beaucoup de patience et de dévouement, et c'est bien grâce à elle que des dizaines de gosses ne sont plus analphabètes.

Un fan du st bon vivant

   C'est cette technique d'enseignement éprouvée qu'Alex a transcrite sous forme de programme (qui est à présent disponible). Et devinez quel ordinateur a choisi pour implémenter ce programme ? Mais voyons, dites-vous, ça ne peut être qu'un Apple II, celui que les écoles choisissent toujours ! Perdu, Jerry et Roberta ont choisi le ST.

   Le ST a toujours été un ordinateur dont le potentiel n'a jamais été vraiment exploité, mais ses capacités sont évidentes pour les connaisseurs. Il dispose de suffisamment de mémoire, de puissance de calcul, de résolution graphique pour faire du travail sérieux. Or, à l'époque, en 1988, la plupart des écoles étaient en effet équipées d'Apple II (la vague des PC bon marché est venue bien plus tard). Mais si le programme avait dû être réalisé sur Apple II, cela aurait exigé de le faire en mode monochrome (rares étaient les écoles dotées de moniteurs couleur), de le faire tenir dans les malheureux 48 Ko de la machine, et de se passer de souris. En bref, cela aurait sérieusement compromis les chances de succès du programme. C'est pourquoi les Pournelle ont choisi le ST. Et de plus, Jerry apprécie beaucoup cette machine.

   Par ailleurs, Jerry est quelqu'un qui sait s'amuser et abandonner tout sérieux lors de certaines surprises-parties. Il vous faut savoir que la micro-informatique abonde en réception ennuyeuses, où des journalistes s'entourent de petits groupes et pontifient interminablement. Peu importe le sujet sur lequel ils pérorent, que ce soit la vie secrète de Bill Gates ou les philosophies comparées du Mac et de l'OS/2, pourvu qu'ils satisfassent leur ego. Et la soirée se dilue dans des flots de paroles insipides.

   Par contre, il est difficile de s'ennuyer dans une soirée où Jerry se déchaîne. "Comment, un Monsieur à l'air si sérieux ? Dave exagère", pensez-vous. Ah, j'exagère ? D'accord, prenons un exemple. Tenez, la fois où Philippe Kahn, patron de Borland, organisa à San Francisco une soirée "romaine" [NdT: où les invités portent des toges.] Celle-ci se tenait dans la cour intérieure d'un hôtel. Un ami et moi y fîmes un saut. Il y avait certes un orchestre, un bar somptueux, et des toges partout. Mais surtout, dans les galeries qui surplombaient la cour, des gens commençaient à remplir des préservatifs avec de la mousse à raser pour pouvoir les balancer sur la foule depuis le troisième étage "quand il commencerait à y avoir de l'ambiance".

   J'avoue m'être dégonflé et avoir déguerpi. Mais Jerry, lui, resta, bien qu'il eut la Foire informatique à inaugurer le lendemain matin. Il acquit ce jour-là une certaine gloire car il parvint non seulement à être présentable pour le discours inaugural, mais en plus à se faire applaudir par 3000 personnes dans une salle bourrée à craquer, malgré une mémorable gueule de bois (qu'il soignait à la bière).

Le manoir du chaos

   Enfin, la maison de Jerry, qu'il appelle "le manoir du chaos", est vraiment surprenante. On a beau savoir qu'il s'intéresse à la stratégie et aux jeux de guerre, on reste quand même stupéfait en découvrant une demeure remplie d'armes moyenâgeuses authentiques. Je me souviens d'une soirée donnée lors de la convention HackerCon 2.0, où Jerry avait amené une hache de bataille à double tranchant, qui fut bientôt baptisée "double face, double densité!"

   L'apothéose, c'est le bureau de Jerry, au fond duquel trône une cible sur laquelle il tire au pistolet à plombs. Quand un attaché de presse mal inspiré lui envoie un produit qu'il n'aime pas, il colle celui-ci sur la cible et tire dessus... pendant qu'il téléphone à l'attaché. J'ai d'ailleurs récupéré l'idée pour mon propre bureau, et j'aime me défouler ainsi après un appel téléphonique particulièrement pénible. Les disquettes 3,5 pouces font d'ailleurs d'excellentes cibles !

Vaches sacrees

   Voilà donc qui est pour moi Jerry Pournelle. Dans l'univers de la micro, on entend parfois des gens qui le condamnent. Mais le plus souvent, ce sont plutôt des gens creux, qui désapprouvent tous ceux qui ne partagent pas totalement leurs opinions. Ou bien ce sont des membres de quelque secte dont Jerry a malmené les vaches sacrées dans un article.

   Son image publique assez rébarbative est nécessaire pour décourager les importuns, mais je puis le juger par ce qu'il a fait, et non par son apparence. Et je l'ai vu faire preuve d'une bonté qu'on ne s'attend certes pas à trouver sous une tenue camouflée ! Enfin, ce qui ne gâte rien, c'est un auteur à succès, et ses livres font la fortune des libraires. Comme exemple à suivre, croyez-moi, on peut trouver bien pire.

"So, what's Pournelle really like?"
Traduction et adaptation Password 90


Date de création : 16/02/2015 : 09:10
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